Mediation animale : Mme S-Chayna : un chien un lien à la réalité

Vous avez surement entendu parlé des séances de médiation animale en institutions spécialisées avec des personnes âgées, ou handicapées…L’association de médiation animale Nantaise : Coeur d’Artichien a la particularité d’intervenir au domicile des familles ou sur le lieu de résidence  des personnes afin d’effectuer des séances de médiation animale individuelle. Aujourd’hui, je vous propose de découvrir et de partager l’expérience  d’ une séance individuelle de médiation animale avec vous.

Séance individuelle de médiation animale :

Mme S-Chayna : un chien un lien à la réalité

coeur d'artichien mediation animale Nantes 44 MmeS-Chayna

La rencontre avec Mme S

La psychologue gérontologue d’un EHPAD Nantais m’a contacté pour une résidente en Août 2010. L’accompagnement de cette patiente est compliquée pour l’équipe pluridisciplinaire de l’établissement. La psychologue recherche une autre manière d’aborder le soin pour cette personne. Elle recherche une activité qui lui permette de s’apaiser.

Avant la première séance avec mes patients, je rencontre la famille et l’équipe soignante.

Pour Mme S, c’est avec son filleul et la psychologue qu’aura lieu l’entretien préalable.

Je recueille différents éléments cliniques au sujet de cette personne comme :

  • Mme S crie jour et nuit, et a des excès d’agressivité envers les aides-soignantes,

  • Mme S est très angoissée et n’aime pas les départs de sa chambre quand le personnel la quitte. Le moment de séparation est difficile.

  • Mme S a beaucoup voyagé,

  • Mme S aime les chiens, et a toujours eu un très bon contact avec eux.

Pour Mme S, je choisis Chayna, une chienne très douce et calme. Elle a 3 ans, c’est un berger australien avec un caractère docile. Elle obéit facilement. C’est une chienne apaisante.

Objectifs personnalisés

Lors de notre première rencontre, une relation particulière s’est instaurée entre Mme S et Chayna. Chayna a su rapidement se faire aimer par Mme S, ce qui a valorisé Mme S. Durant la première séance, Mme S n’a pas crié une seule fois, et l’équipe a été surprise de constater qu’elle souriait et que son visage s’ouvrait.

L’objectif fixé avec l’équipe et la famille est de tenter d’apaiser Mme S avec l’aide de ma chienne afin d’atténuer l’agitation qu’elle manifeste parfois avec le personnel, perçu comme étant de l’agressivité. L’objectif suivant est de lui permettre de s’investir dans une activité avec une notion de plaisir. Mme S supportant peu les visites, il est important de maintenir des liens sociaux avec le monde extérieur. Le chien permet de faciliter la relation à l’autre, et la rendre moins anxiogène pour Mme S. Le chien utilisé comme catalyseur social va permettre à Mme S, de maintenir un lien avec la réalité. Avec ce support de médiation, j’ai travaillé sur la présence symbolique et continue de Chayna en dehors des séances de médiation animale hebdomadaires . Le but est de permettre aux équipes de pouvoir utiliser, si elles le souhaitent, la présence symbolique de l’animal dans leur travail au quotidien avec cette dame. Cette notion soulève la question suivante : Où commence et où finit une séance de médiation animale ? (article en ligne sur www.coeurdartichien.fr).

Le contenu des séances de médiation animale

Avec Mme S, l’animal est une ouverture à la communication : à partir du discours de Mme S et de ses observations sur ma chienne, la discussion par association d’idée va dévier sur sa propre histoire et ses ressentis. Lors de nos sorties en extérieur, nous constatons avec l’équipe que le visage de Mme S s’ouvre et se détend. Elle se redresse dans son fauteuil roulant, et utilise ses mains pour lancer le jeu du chien qui lui rapporte en produisant des stimulations sonores (vocalises de joie) et visuelles (queue qui bouge, regard pétillant, oreilles bien droites). Durant les séances, il n’y a aucun signe d’agressivité de la part de Mme S, cependant il arrive parfois que Mme S rejette l’activité et la présence de la chienne. Il y a eu un temps de rupture dans cette prise en charge qui a permis un questionnement avec l’équipe et sur mon positionnement professionnel avec cette patiente : comment travailler avec une personne dans le refus ? Ce thème sera le sujet d’un prochain article sur le site de association Coeur d’Artichien. Il est important dans ces moments-là de respecter le choix subjectif de la personne tout en cherchant une ouverture possible, c’est la question du sens : quel sens a cette activité pour cette personne ? Pourquoi ça bloque ? Y’a-t’il une possibilité d’ouverture ? Faut-il passer le relais ? coeur d'artichien mediation animale 44 nantes MmeS-Chayna2

Après 7 mois de séances très productives, l’évolution complexe des symptômes présentés par Mme S a pris le dessus. Cependant lorsqu’elle est disponible pour voir Chayna, elle retrouve un moment de détente, un moment pour elle où elle peut exprimer ses ressentis et profiter de la présence de Chayna. Elle peut échanger sur son histoire familiale, ses envies, ses peurs, ses angoisses. Au fur et à mesure des séances, nous avons pu recueillir des éléments sur son histoire que l’équipe a pu réutiliser au quotidien dans leur travail avec Mme S (ses goûts culinaires, les pays qu’elle a visités, le métier qu’elle faisait, son lien avec sa famille, les chiens, etc.).

Avec Mme S, il y a des hauts et des bas. Quand elle traverse une période difficile, elle dort beaucoup et souhaite entrer en communication avec personne, même avec Chayna. Il y a des périodes où elle refuse de s’alimenter. Nous avons travaillé sur ce thème, et durant plusieurs séances, elle a accepté de manger des yaourts sucrés, pour le plaisir de faire lécher le pot à Chayna.

Conclusion

En conclusion, je dirais que réaliser cette activité assistée par l’animal avec cette dame lui permet d’investir un espace de travail avec plaisir, ce qu’elle refusait de faire pour toutes activités auparavant. Le lien affectif qui a été créé avec ma chienne de travail, est un point de repère affectif, et un ancrage à la réalité important. De plus, cette activité permet de maintenir partiellement une partie des facultés cognitives (langage, mémoire…) et physiques (mouvements des bras, travail sur l’ouverture de la main, etc) de cette patiente ainsi que des liens sociaux, et par conséquent un peu de sa singularité.

Article écrit et réalisé par Aurélie Vinceneux, Fondatrice de l’Association Coeur d’Artichien ©

Ce document ne peut-être utilisé, reproduit, modifié ou communiqué sans
l’autorisation d’Aurélie Vinceneux.
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4 Commentaires pour “Mediation animale : Mme S-Chayna : un chien un lien à la réalité”

  1. 1Nelly

    Aurélie,

    « Ce document ne peut-être utilisé, reproduit, modifié ou communiqué sans l’autorisation d’Aurélie Vinceneux »

    « Ce document doit être lu, lu et relu sans l’autorisaton d’Aurélie Vinceneux ».
    Bravo.

  2. 2Camille

    Super article, c’est intéressant. Comment réagit Mme S à la fin des séances et que la chienne doit partir ?
    J’aime beaucoup la solution trouvé pour la faire manger des yaourts !

    Bonne continuation !
    Camille

  3. 3Aurélie Vinceneux

    Merci Nelly pour tes encouragements….
    et tu peux le faire lire et relire autant que tu veux.
    Bon dimanche
    Aurélie

  4. 4Aurélie Vinceneux

    Merci Camille. Mme S est une dame pour qui les départs et les séparations sont difficiles. Au début des séances, Mme S criait au moment du départ de la chienne. J’ai pris le temps d’en parler avec elle, de comprendre ce qui l’angoissait, puis nous avons ritualisé toujours de la même manière la fin des séances afin que cela devienne moins angoissant, et plus contenant. Au fur et à mesure du temps, Mme S a intégré le fait que je revenais toutes les semaines à la même heure, une relation de confiance s’est installée. La fréquence des cris et l’expression de ses angoisses se sont estompées. Le cadre est devenu contenant et donc apaisant. On a aussi travaillé sur un support photo pour travailler avec l’équipe sur la présence symbolique de Chayna le reste de la semaine.

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