Gerontologie partie 2 : L’empathie, ou comment le dire autrement.

vendredi, 29 novembre 2013, 12:04 | Catégorie : Gérontologie

Chers lecteurs,

Il y a quelques mois Marine Caillot Psychologue gérontologue était venue se présenter dans l’article : La gérontologie, mieux connaitre les personnes âgées partie 1. Aujourd’hui elle partage avec vous, une notion clé dans notre pratique de la médiation animale. En effet, en tant qu’intervenant en médiation animale nous sommes doublement concernés par cette notion d’empathie, car nous devons y être vigilent auprès de nos bénéficiaires, mais également dans notre travail avec nos partenaires à 4 pattes. Rappelons qu’eux n’ont pas demandé à aller se faire caresser par des personnes tremblotantes, qui sentent parfois mauvais (odeurs démultipliées par la puissance du flaire du chien), qui peuvent avoir des gestes brusques ou dégagent des émotions négatives fortes. A nous donc de rendre ce travail agréable et ludique pour eux. C’est ce qui permettra d’être garant de séances de qualités au fil du temps. A bientôt pour de nouvelles aventures. Aurélie Vinceneux

L’empathie, ou comment le dire autrement…

Il y a une poignée de jour, j’animais une formation sur les notions de bientraitance et de maltraitance auprès de soignants (il y avait 1 homme 1!),

Évoquant l’empathie, une des stagiaires me dit : « Moi quand j’ai des stagiaires aide-soignants, ça ne m’intéresse pas de leur transmettre les techniques, mais je tâche de les attraper dans le couloir pour pouvoir leur glisser : «  C’est toi qui es dans le lit quand tu fais tes soins ! », comprenez : « ».

 Et bien voilà, comme souvent, le franc-parler de ces soignants qui sont au chevet tous les jours de nos aînés, met en mots ce que nous mettons 10 diapos d’un powerpoint à théoriser.

 Belle démonstration d’un savoir empirique. Comment de son quotidien, elle avait perçu, et elle mettait en œuvre tous les jours cette adage.

Mais alors !

  • Est-ce que cela veut dire que si je ne m’occupe pas bien de moi, je ne m’occuperai pas bien des autres ?
  • Est-ce que cela veut dire que si je suis totalement décentrée de moi, de mes besoins, je serai incapable de sentir les besoins de l’autre ?
  • Enfin, et bien sûr, est-ce que cela veut dire que j’ai tout intérêt à être plus ou moins au clair avec l’idée qu’un jour je serai peut-être incontinente, sourde, douloureuse dans un lit d’institution et que je croiserai les doigts chaque matin pour que celle ou celui qui s’occupe de ma toilette aujourd’hui soit centré, clair, authentique et pas dans le déni de son propre devenir potentiel que je représente ?

 Et bien, cette phrase a résonné plusieurs jours en moi, et d’ailleurs j’écris à ce sujet aujourd’hui, c’est pour dire !

J’ai donc proposé cette dimension quelques jours après à d’autres stagiaires aides à domicile dans le cadre d’une formation sur Alzheimer.

Au milieu de nos échanges je propose cet exercice de décentration :

 « Imaginez-vous que vous soyez vieux, dément, pas un dément serein, non, un dément perdu, dans son environnement, perdu dans sa propre identité, vous ne savez pas qui vous êtes, vous ne savez pas où vous êtes. Vous n’avez pas choisi votre menu ce midi puisque vos repas sont livrés. Vous n’avez pas non plus choisi l’heure à laquelle vous déjeunez puisque c’est au moment où l’aide à domicile est là que vous devez manger, puisque votre fille exige d’avoir une traçabilité de ce que vous avez mangé ».

Les mâchoires se sont un peu affaissées, et les visages se sont crispés, proposant presque, pour certaines (que des femmes ici!) une mine de dégoût.

            « Mais c’est horrible ! »,

            « On n’a pas envie de vivre ça ! »

            « Ça fait peur ! »

            « Si c’est pour finir comme ça autant arrêter maintenant ! »

C’est à ce moment là que j’ai réalisé que certains professionnels n’avaient jamais fait cette petite gymnastique de perception, se décaler, se mettre à la place de, enfin, comme on peut car quand on a 30 ans, on a beau faire tous les exercices possibles, on ne sait pas ce que c’est que d’avoir 85 ans, voilà encore une des expériences de vie comme la maladie grave, la vieillesse et plein d’autres qu’on ne peut pas expérimenter avant d’y être. D’où l’angoisse, l’absence de contrôle possible.

Alors on fuit.

Cela me confirmait bien que certains sont au chevet des anciens pour éviter la question, la mettre de l’autre côté de la barrière, tenter de la contrôler.

J’avais bien lu ça déjà, j’avais appliqué un miroir sur mes propres motivations en mes temps de débutante, alors tout cela ne m’était pas étranger, mais là, je l’expérimentais et le vivais.

Après ces réactions de rejet, je proposais de s’adonner à ce petit exercice de temps en temps, de s’interroger sur son rapport à la vieillesse, à la mort,

 Et je proposais surtout de profiter de chaque instant de notre vie afin que notre fin ne soit pas synonyme de regrets, de rancœur, de secrets.

 Car, vous et moi voyons bien que ceux qui partent sereins sont ceux qui ont assumé, qui ont dit, qui ont vécu, qui ont ri, qui ont aimé, qui se sont réalisés.

 Enfin, je partageais, que oui, un jour nous serons vieux, vous, moi, tous si la vie nous emmène jusque là, et que ça, au moins, c’est une certitude.

 CAILLOT Marine

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Un commentaire pour “Gerontologie partie 2 : L’empathie, ou comment le dire autrement.”

  1. 1didier

    …. quid du potentiel vécu par ces personnes vieillissantes, de leurs richesses si rarement partagées parce que enfouies, murées et qu’il serait si intéressant de valoriser pour que la sagesse acquise, masquée par toutes ces altérations dues au temps qui passe soit utile aux jeunes générations et pas qu’aux seuls soignants qui œuvrent sous le joug de la crainte du mal vieillir.

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