Les danseurs de l’unité protégée, par Daphné intervenante en médiation animale

couple-de-vieux-maries-danseursBonjour à tous,

C’est Daphné, Intervenante pour Coeur d’Artichien qui a pris la plume pour partager avec vous une expérience qu’elle a vécu au sein d’une unité protégée lors de ses interventions en médiation animale. Belle lecture à vous. Aurélie Vinceneux 

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Voici une petite histoire qui parle de relation d’aide et d’amour dans la maladie.

Arrivée depuis peu dans l’unité, Mme A se faisait toute petite à sa première séance de médiation animale. C’était une personne discrète dont le visage et les manières exprimaient une douceur et une gentillesse qu’on rencontre rarement. Elle n’était pas particulièrement familière des animaux en général, un brin mal à l’aise, leur rencontre était pour elle une vraie découverte dans laquelle elle avait besoin d’être accompagnée. Elle avait pris très au sérieux l’un des objectifs de l’activité: celui de l’aider à maintenir ses capacités cognitives tout en prenant plaisir à chouchouter les animaux.

A la seconde séance, elle est arrivée accompagnée de son mari en visite. A l’image de sa femme, c’était un homme charmant, tout en discrétion et en pudeur. Il la tenait tendrement par le bras, comme deux danseurs qui vont s’élancer sur le parquet bien ciré d’un salon. Mr. A est resté spectateur assis à côté de sa femme. Il l’a vue sourire, rire, faire des efforts, caresser avec bonheur mes boules de poils, le tout dans une ambiance sympathique et rassurante. Il s’est lui aussi détendu, heureux de voir sa femme si apaisée.

Mr A est ensuite venu à chaque séance, figure rassurante et encourageante pour sa femme qui est devenue de plus en plus familière avec les animaux avec le temps. D’une certaine façon, Mr A a compris que lui et moi jouions dans la même équipe pour aider sa femme. Je lui ai appris à la laisser faire, à ne pas toujours chercher à l’aider et à faire à sa place. Ca n’a pas dû être facile pour lui d’être confronté à ses difficultés grandissantes sans agir mais il n’a pas baissé les bras et il a lui aussi fait des efforts pour qu’elle puisse travailler ses compétences. Il a rapidement saisi l’intérêt de la médiation animale dans la lutte contre la maladie de sa femme et l’a soutenue et encouragée du mieux qu’il a pu. Je pense que la médiation lui a aussi permi d’adoucir l’acceptation de l’avancée de la maladie. Il profitait chaque mois d’un temps d’échanges avec moi sur son évolution, quelques mots glissés rapidement dans un couloir, une poignée de main chaleureuse et un regard complice. J’ai compris très vite qu’en aidant Mme A, j’aidais aussi Mr A.

A notre dernière séance, nous avons distribué les photos souvenirs. Celles de Mme A étaient particulièrement réussies, elle rayonnait, superbe et souriante entourée de cochons d’inde. Rien à voir avec la personne perdue et effacée de la première séance. Mr A était ému aux larmes de découvrir les photos de sa femme si belle et si heureuse. Il m’a dit « les enfants vont être contents de la voir comme ça ».

Six mois plus tard, je suis revenue intervenir une après midi dans le cadre d’une animation offerte par des étudiantes. J’ai pensé à Mr et Mme A, je me suis demandée si la maladie avait beaucoup évolué. Je me suis préparée au pire. J’ai été soulagée de retrouver mes deux danseurs en assez bonne forme, toujours aussi unis, toujours pleins d’amour. Mr A m’a saluée chaleureusement, il m’a reparlé des photos qu’il a fait encadrer et que leurs enfants ont fait reproduire. L’exercice du jour consistait à guider le chien sur un parcours de motricité (des obstacles, un slalom, un tunnel). Arrive le tour de Mme A et me voilà un peu angoissée et pleines de questions. A t-elle beaucoup « perdu » ? Va t-elle y arriver ? L’enjeu est important, Mr A doit attendre ce « test » lui aussi avec inquiétude, je vois qu’il se tortille sur sa chaise. Il me confie le bras de sa femme et l’encourage encore une dernière fois. Je respire un grand coup, j’ai l’impression qu’on va courir un marathon. Mme A s’accorche à mon bras, je la rassure, l’oriente, on prend notre temps. Elle me fait confiance, mon chien a compris qu’il se passait quelque chose et se tient à carreaux. Je crois que j’ai cessé de respirer pendant les minutes qui ont suivi. Mme A s’applique, elle m’écoute et donne les bons ordres « saute, dedans », je la guide mais elle se débrouille bien. Je suis soulagée qu’elle n’ait pas « trop perdu », même si les mots se mélangent désormais dans son discours. Mr A se lève pour acueillir sa femme, je lui confie son bras à mon tour. Il est souriant et me glisse, très fier, « elle est encore capable, vous avez vu ?« .

Daphné, Intervenante en médiaiton animale

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3 Commentaires pour “Les danseurs de l’unité protégée, par Daphné intervenante en médiation animale”

  1. 1sudarovich

    Merci pour ce si beau témoignage tout en douceur, respect et retenue qui m’a fait venir les larmes!
    Hélène

  2. 2csyl16

    Merci pour ce merveilleux témoigne qui exprime si bien votre rôle dans cette structure et la place primordiale de l’animal pour ces personnes fragilisées et/ou atteintes d’une maladie évolutive.
    J’espère que la personne que vous évoquez va bien, avec l’aide de son mari – qui a tout son rôle ainsi – et, bien sûr, toujours la vôtre.
    Félicitations. Continuez ainsi.
    Sylvie

  3. 3Daphné Marcoux

    Bonjour,
    merci pour vos petits mots, je suis heureuse d’avoir pu partager avec vous ce fragment de vie. Je pense encore souvent à eux mais je ne demande pas de leurs nouvelles. Il faut aussi savoir laisser pousser les fleurs une fois que l’on a semé les graines 😉

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